Tout pratiquant d’un sport d’eau vive responsable se doit de connaître ses droits et ses devoirs avant de s’engager sur un cours d’eau tant en terme de droit d’accès qu’à la préservation de son milieu.
Le secteur de l’eau, en France, fait l’objet d’un encadrement juridique très rigoureux. Toutes les dimensions de l’activité sont prises en compte par la réglementation française.
Depuis des siècles, le droit s’est intéressé à la gestion de l’eau. Mais le droit français n’a cessé de prendre en compte l’évolution de notre société au sein même des différentes lois sur l’eau.
Un peu d’histoire sur le Droit à l’eau
Le droit romain, qui a beaucoup inspiré le droit français, classait déjà l’eau parmi les « res communæ« , choses communes, n’appartenant à personne et restant à l’usage de tous. Il introduit aussi une distinction entre cours d’eau domaniaux et non domaniaux.
A l’époque féodale, les eaux appartiennent de fait aux seigneurs : elles sont soumises à leur police et à leurs péages. L’essor du pouvoir royal établit la propriété de l’État sur les grandes voies navigables, les petits cours d’eau restants attribués aux seigneurs locaux.
Puis, la Révolution et le code civil restituent tous les droits à l’État, précisant que « nul ne peut se prétendre propriétaire exclusif des cours d’eau« .
Depuis 1790, ce sont les communes qui, au titre du maintien de la salubrité publique, sont responsables de l’alimentation en eau des populations.
Au cours des dernières décennies, le droit à l’eau s’est largement étoffé. L’eau n’est pas une ressource comme les autres.
« L’eau n’est pas nécessaire à la vie, elle est la vie« .
Saint-Exupéry
La loi sur l’eau du 16 décembre 1964
La gestion de l’eau : la pollution
La première loi organisant globalement “la gestion de l’eau et son service” est la loi cadre de 1964. Elle crée une action administrative coordonnée, renforce la réglementation, en particulier pour protéger le consommateur. Son décret d’application de 1966 met en place les agences de l’eau pour développer la protection des ressources.
Elle a pour effet de mettre en œuvre une réglementation de la pollution des eaux : elle conduit à :
- Constater et mesurer les rejets polluants,
- Identifier les auteurs,
- Interdire les pollutions les plus graves,
- Sanctionner leurs auteurs,
- Faire supporter aux auteurs de pollutions plus légères inévitables, la charge financière du traitement de leurs eaux usées, en les incitants par ailleurs à améliorer la dépollution de leurs rejets.
Le découpage du territoire en bassin hydrologique
C’est surtout cette loi qui introduit en France le cadre géographique du bassin versant pour la gestion des problèmes d’eau.
Ainsi six zones géographiques nommées « bassins hydrographiques » sont délimités par les « lignes de partage des eaux » correspondant respectivement aux cinq grands fleuves français (Rhône, Rhin, Loire, Seine et Garonne), auxquels s’ajoute la Somme.
Les droits d’accès à l’eau
Pour l’ensemble des usagers des cours d’eau, sportifs ou non, la loi de 1964 introduit des termes encore actuellement en vigueur tels que les cours d’eau domaniaux et non domaniaux.
- Les cours d’eau domaniaux : Le lit et les eaux font partie du domaine public, les berges sont donc librement accessibles au public.
- Les cours d’eau non domaniaux : Le lit et les berges appartiennent aux propriétaires riverains ; il faut une autorisation des propriétaires pour accéder aux rives ou embarquer dans les endroits privés.
L’eau “patrimoine de tous” : loi sur l’eau du 3 Janvier 1992
La loi sur l’eau de 1992 est désormais le cadre général d’une gestion où l’eau est le « patrimoine de tous« . Un patrimoine qu’il est nécessaire de protéger, grâce notamment à la généralisation de l’assainissement des eaux usées.
Cet ensemble législatif a été conçu en tenant compte de l’application de la directive européenne relative au « traitement des eaux urbaines résiduelles » de 1991.
D’autres textes législatifs complètent le dispositif. Ils portent en particulier sur l’information des consommateurs et sur les rapports contractuels entre les collectivités et les entreprises spécialisées délégataires (loi Sapin du 29 janvier 1993 et loi Barnier du 2 février 1995).
La loi sur l’eau et les milieux aquatiques : 30 décembre 2006
Sur proposition du ministre de l’Écologie et du Développement durable et après une phase de concertation et de débats qui a duré près de deux ans la loi n°2006-1772 sur l’eau et les milieux aquatiques a été promulguée le 30 décembre 2006 (J.O. du 31/12/2006).
Les objectifs de cette loi
- Reconquérir la qualité des eaux et atteindre en 2015 les objectifs de bon état écologique fixés par la directive cadre européenne (DCE) du 22 décembre 2000.
- Retrouver une meilleure adéquation entre ressources en eau et besoins dans une perspective de développement durable des activités économiques utilisatrices d’eau.
- Donner aux collectivités territoriales les moyens d’adapter les services publics d’eau potable et d’assainissement aux nouveaux enjeux en termes de transparence vis à vis des usagers, de solidarité en faveur des plus démunis et d’efficacité environnementale.
- Moderniser l’organisation des structures fédératives de la pêche en eau douce.
Que retenir pour nous, pratiquants sportifs, usagers des cours d’eau ?
L’État Français a mis en place au cours du dernier demi-siècle, une prise en charge globale de la gestion de l’eau. Sa mission est de prendre en compte l’ensemble des problèmes lié à l’usage ou l’accès à l’eau en passant par la protection, la conciliation, l’aménagement et l’information.
La protection du consommateur
Un but essentiel de l’ensemble de ses lois est d’arriver à protéger le consommateur en prenant en compte :
- Qualité de l‘eau potable,
- Gestion des ressources,
- Assainissement des eaux usées,
- Gestion des services de distribution et d’assainissement,
La protection de l’environnement
La rivière est un écosystème composé pour lequel certains éléments sont fondamentaux à son bon fonctionnement :
- Niveau de qualité de l’eau (ou de pollution) : taux d’oxygène, de matières organiques, de nutriments, de substances toxiques et le niveau bactériologique.
- Quantité d’eau : Variation crues / étiages.
- État du fond et des berges refuges pour animaux, reproduction, autoépuration.
- Richesses faunistique et floristique : plus le milieu est riche, mieux il fonctionne.
La normalisation des sites de pratiques
Les fédérations sportives, la FFCK pour les rivières et la FFME pour les canyons, ont le pouvoir de d’établir des classifications des sites de pratiques en fonction de leur difficulté technique et de sécurité relative au parcours.
La conciliation entre usagers
Comme tous les sports de nature, la pratique d’une activité sur un cours d’eau s’exerce dans des espaces ou sur des sites du domaine public ou privé.
Aussi dans la pratique des sports d’eau vive, il est indispensable avant de s’engager sur une rivière de connaître la réglementation concernant la circulation sur les cours d’eau et l’accès aux berges, identifier la nature juridique du parcours (domanial / non domanial), mais aussi se renseigner sur les réglementations existantes sur le parcours souhaité.
La conciliation entre les usagers passe par l’accès à l’eau, c’est évident, mais également à tous les utilisateurs du cours d’eau, à savoir les pêcheurs, les baigneurs, les locaux.
Des arrêtés préfectoraux peuvent interdire l’accès à certains usagers identifiés pour limiter l’accès, préserver le milieu ou répartir des tranches horaires de navigation. Cette démarche rentre dans le cadre de la conciliation des usagers.
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Nul n’est censé ignorer la loi 😉
Marie